Spéléologie glaciaire à Moiry


Préface

“Bon les gars, demain on part dans le Dévoluy ! il y a plein d’endroits à découvrir vers l’Obiou puis vers le Grand Ferrand. Il va faire beau, ça va être cool. Et en bonus, de nombreux repérages à faire pour de futures sorties spéléo !”… Mais cela était sans compter sur le premier imprévu. Je rate un appel de Bab à 16h22, son message plutôt explicite dit : “spéléo glaciaire en Suisse ce week-end avec Alain.” Bon, soyons être honnêtes : ça fait rêver ! C’est la bonne occasion, mais tout était prêt pour un séjour dans le Dévoluy avec les 3 zouaves GUCEMiens… Nouvel objectif : les motiver à changer les plans et trouver du matos. Après quelques rebondissements (“aaaah mais mes chaussures ne sont plus étanches !” “tu m’agaces, j’avais bouclé mon sac !” “elle ferme quand la Rando ?”), c’est tout bon, enfin presque : à 18h, tout le monde a tout ce qui faut, mais aucun sac n’est fait. J’ai eu Alain au téléphone : ils sont 5 sur place. Eh bien, c’est parti pour une bonne (heu…) “nuit” de sommeil : demain départ 5h.

Le trajet aller

(Et oui, ça nécessite un paragraphe…)

5h du mat’, la campagne n’a pas encore blanchi et Paris est encore endormie, mais nous sommes là, tous les 4 (Solveig, JB, Baptiste et moi) devant la voiture, plus ou moins la tête dans le cul. Après un atelier de Tétris pour caler les sacs dans le coffre, on attaque vaillamment les 4h30 de route pour rejoindre Alain et ses troupes. D’autres attaquent d’ailleurs tout aussi vaillamment une deuxième nuit. Petit passage chez Man pour prendre un baudrier pour Solveig, l’occasion d’écouter les conseils du “vieux” sage : on va descendre sur des cordes fines, les chocs sont interdits. Ca met dans l’ambiance ! C’est donc dans la joie et la bonne humeur que nous reprenons la route vers la Suisse. Passons plusieurs dizaines de kilomètres de sieste (surtout pour les passagers, du moins il paraît) et nous ne sommes enfin plus qu’à 30 minutes du lac de Moiry.

“Eh Benoît, c’est normal ce bruit ?”

Silence.

“Heu…”

Mince… on a crevé. Je n’ai pas de roue de secours, et le liquide de réparation ne suffit pas pour combler ce type de trou. On appelle l’assistance, on cherche un garage, mais tout est fermé le samedi en Suisse. Après quelques coups de fil, quelques erreurs de numérotation, du thé, re-des coups de fil, des gâteaux, re-re-des coups de fil, j’ai enfin le dépanneur au téléphone. La bonne nouvelle, c’est qu’il a des pneus d’occasions pour 45 euros. Il vient nous chercher. On abandonne “lâchement” JB et Baptou sur le bord de la route -précisons qu’il y avait là un banc au soleil, de la bouffe, et un joli paysage… aucun humain n’a été maltraité pendant le tournage!- et direction le garage… Ouf !

Finalement, après un intermède réparation de 4h, nous arrivons enfin au parking.

Spéléo glaciaire, le vif du sujet

Nous nous pressons et partons le long de la moraine, entraînés à un rythme effréné par la locomotive JB. Arrivés à un replat, nous cherchons les sacs du groupe d’Alain. Les cinq compères seraient normalement dans le grand moulin central. Nous voilà proches du glacier, je cours vers le trou pendant que les autres préfèrent s’équiper (“faites ce que je dis, pas ce que je fais”, on la connait tous celle-là). Devant le puits, je vois la corde de 5,5 mm amarrée par 2 broches à glace et une lunule. Les trois autres me rejoignent et nous nous préparons à descendre dans le glacier : il en faut, tout un attirail ! Une fois harnachés, nous nous engageons dans le premier puits d’une quarantaine de mètres avec 3 fractionnements. Suivant scrupuleusement les conseils du Chef, nous installons la corde d’une façon spécifique dans le descendeur. Il faut dire que nous ne faisons pas vraiment les malins. Ça ambiance d’être plein gaz avec seulement quelques millimètres dans les mains ! on y va doucement… très doucement. Pas d’à coups, on a dit ! “Heu, qu’est-ce qu’on fout là déjà au juste ?”. A peine avons-nous rejoint le fond qu’un long méandre partant vers l’Ouest nous apporte la réponse. Les couleurs de la glace et les formes à l’intérieur du glacier sont magnifiques. Nous empruntons le méandre et avançons en suivant les mains courantes posées par l’équipe d’Alain. Nos yeux scrutent tout autour en cherchant à comprendre comment cela s’est formé. Quelle magie que ces parois translucides sculptées ! Nous rejoignons les 5 compères vers 17h. Ils ont arrêté leur progression par manque de broches à glace et se retrouvent devant un méandre très étroit. Mince, j’ai laissé mes broches à la voiture… !! Mais nous avons déjà fait une belle spéléo dans le glacier et il est l’heure de remonter à la surface. Ce qui est plus facile à dire qu’à faire ! Le pantin ne bloque pas toujours sur la corde, et JB dit que son croll ne bloque pas non plus… mais que c’est génial ces cordes, on met 100m dans des micro-kits !

Nous rentrons de nuit aux voitures. Nous installons le bivouac et préparons à manger. C’est l’occasion de discuter et faire connaissance avec la sympathique équipe que nous avons rejointe. Que de projets et d’histoires à partager ! 🙂 Il faut dire aussi que l’équipe d’Alain, Solveig et moi n’avons pas mangé ce midi, ça commençait justement à être dur, nous avons les crocs ! Après un bon repas (et un partage de spécialités locales, merci les Belges pour la bière et les copains pour le génépi !), dodo pour tout le monde : demain, on remet ça !

Le réveil est d’ailleurs plus ou moins dur. Après un bon petit déjeuner, nous repartons vers le glacier. Cette fois-ci, nous choisissons de remonter toute la langue glaciaire. Comme des gosses, nous cherchons des trous “intéressants” (c’est-à-dire dans lesquels nous pouvons nous complaire à nous mettre à l’ombre, dans le froid, de préférence pas trop sous la flotte qui ruisselle, pendant qu’il fait tempête de beau temps à l’extérieur). Nous trouvons donc une zone “intéressante” en rive gauche, avec un beau puits donnant accès à la base du glacier. L’équipe d’Alain équipe le puits pendant que j’installe une stat pour faire de la cascade de glace. Je m’en rends un peu plus compte aujourd’hui mais tout le matériel d’Alain est composé de prototypes Petzl qui seront plus ou moins amenés à être mis sur le marché. La glace est d’un bleu profond ici. Les couleurs sont extraordinaires. 

Une heure plus tard, le moulin est devenu un vrai parc d’attractions : descente par un puits, remontée par un autre, traversée, cascade de glace, … “et tu crois qu’il y a quoi par là-bas ?” “Ouch ça pisse bien par ici !” “heu les gars, comment qu’on fait une conversion ?” “Mais descends tes talons enfin !!!” “heu, là c’est bon le blocage du descendeur ?”

Après avoir épuisé nos petits bras dans la cascade et mangé un morceau, nous quittons le glacier vers 13h. Le voyage de retour se passera sans encombre avec un petit détour chez le Man pour déposer le matériel emprunté la veille.

Laissez un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *